Vous avez constitué votre société par actions et vous êtes maintenant coactionnaire avec trois de vos amis. Mais attention : être coactionnaire d’une société, c’est un mariage d’affaires. Et comme pour le mariage, il est préférable de régler certaines questions lorsque tout va bien, c’est-à-dire dès le début des activités de la société. C’est l’objectif d’une convention d’actionnaires.
En effet, vous ne voulez surtout pas perdre le contrôle de la société (I) au profit d’autres actionnaires qui pourraient venir s’ajouter par la suite. Il en va de même pour votre pouvoir de vote (II).
I – Garder le contrôle!
La gestion de la société par actions est assurée au quotidien par les administrateurs. Le contrôle de la société par les actionnaires est minime puisque, généralement, il y a une seule assemblée des actionnaires par année. Les administrateurs ne sont, en principe, pas liés à un actionnaire en particulier. Ils ne peuvent non plus s’engager à voter pour ou contre telle ou telle décision. Cependant, la convention d’actionnaires peut venir poser des règles afin de vous assurer qu’au moins un des administrateurs soit le représentant de vos intérêts au sein du conseil d’administration.
Elle peut aussi vous permettre de limiter les pouvoirs du conseil d’administration en s’appropriant le pouvoir de prendre certaines décisions et de lier leur vote par avance. On parle ici, par exemple, du pouvoir d’émettre des actions ou encore du pouvoir de déclarer des dividendes. Toutefois, attention : le principe selon lequel les administrateurs sont tenus d’agir dans l’intérêt de la société est toujours applicable même si ce sont les actionnaires qui exercent les pouvoirs du conseil d’administration. Bien entendu, le plus souvent, l’intérêt de la société va de paire avec l’intérêt des actionnaires.
II – Conserver son pouvoir de vote et la valeur de ses actions
En principe, l’organe de gestion de la société, le conseil d’administration, est libre d’émettre de nouvelles actions dans les limites imposées par la Loi. Mais, lorsqu’aucune limite n’est imposée à une telle émission d’actions, cela peut affecter le pouvoir décisionnel que vous avez au sein de la société. De quelle manière?
Le plus grand risque est la dilution de la participation initiale de l’actionnaire. En effet, imaginons que vous avez 100 actions de catégorie « A » dans la société. Le conseil d’administration vient émettre 100 nouvelles actions de la même catégorie. Votre participation au sein de la société vient de passer de 100% à 50%. Ainsi, plus le nombre d’actions d’une catégorie augmente, plus votre pouvoir décisionnel diminue. Cela a également un impact sur la valeur de vos actions puisque le pouvoir de vote et la valeur des actions sont intimement liés.
C’est pourquoi on vient accorder un droit prioritaire aux actionnaires de la société dans une convention d’actionnaires pour leur permettre, lors de l’émission de nouvelles actions, de les acquérir en priorité. On vient ainsi limiter à la fois la dilution du pouvoir de vote et la présence de tiers (nouveaux actionnaires) dans les affaires de la société.
Une fois que vous avez réglé ces questions, il faut passer à la rédaction de la convention d’actionnaires proprement dite. Faire appel à un juriste devient alors indispensable. C’est ce que nous verrons dans une deuxième partie…
Auteur : Mathias Poret, Notaire